vendredi 25 janvier 2008

Inventaire

Société Bénin Pas Cher
"Tous les articles de ménage offert de bon cœur... et à bon prix"

Enseigne :

jeudi 24 janvier 2008

Fragment de palabres (2)

" PAS D'ARGENT PAS D'AMIS "

"Qu'est-ce qu'tu m'as ramené d'France ?" me demande, sans complexe, Fortuné en entrant dans le bureau. Fortuné, 21 ans, est apprenti en imprimerie et n'est souvent que de passage ici. Plus que surprise par cette demande incongrue, je sens monter en moi une irritation que je tente d'étouffer au plus vite dans une réponse négligée.

Que voulait-il bien que je lui ramène ??! Fortuné n'a qu'un rôle de figurant dans ma vie béninoise. Ce n'est pas un ami, mais une connaissance… une lointaine connaissance… comme Joyce, Raymond, la commerçante du coin, Jean-Eudes, Gervais, le couturier, etc. Et pourtant, tous sont venus me voir dès mon retour de France. Certains étaient même surpris, terriblement déçu que je ne leur tende pas un petit paquet soigneusement emballé. Non mais vraiment ! Je n'allais tout de même pas inonder de présents tous les gens que j'avais croisé
au Bénin !

Comme le souligne le journaliste Ryszard Kapuscincki dans son livre Ébène, aventures africaines, "la culture africaine est une culture de l'échange". Si on te donne quelque chose, tu dois rendre. C'est un devoir, un engagement. "Le cadeau est un appel à un geste de retour, à un rétablissement rapide de l'équilibre. J'ai reçu quelque chose ? Je rends !"
L'autre jour, je me suis enlisée dans une marre de sable. Quelques gardiens du quartier sont venus me prêter main forte… en terminant leur bonne action par un agressif : "Tu me donnes quoi ?" Lorsque un Africain "offre de sa personne, sa sollicitude, offre des informations (…), il va de soit que cet homme généreux attend un retour, un dédommagement, une satisfaction.
Je vous rassure… tous ne sont pas ainsi !!

Et si mon quotidien ne s'arrêtait qu'à ce genre de situations…

Je supporte chaque semaine un défilé incessant de pauvres malheureux rivalisant de subterfuges, de médiocrités et de mensonges pour une petite pièce... enfin plutôt quelques billets... 5000 Fcfa pour réparer la moto de Janvier qui n'a pas encore reçu son salaire ; 5000 pour Georges qui a tenté de me faire croire une histoire exubérante, le verbe décontenancé et la larme à l'œil ; 30 000 Fcfa pour l'apprenti d'un artiste hospitalisé ; une tentative pour l'achat d'un téléphone portable de la part d'un collègue ; une demande pour cotiser aux funérailles, du père, d'un très lointain voisin que je soupçonne de tenir encore debout, bref.

Cette situation m'amuse beaucoup… avec un peu de recul. Ils ont tous cette même manière fébrile, dramatique, surjouée, déplacée, et systématique de venir nous voir pour ce genre de demande. D'abord il demande à te parler. A toi seul. A part, loin des regards. Ensuite il te laisse sous entendre que votre amitié est vraiment très importante. Là, il faut comprendre que si tu refuses de l'aider tu risques de culpabiliser pour le restant de tes jours… Ahh ! l'amitié à bon dos ! La plupart ne rendront jamais l'argent car n'en n'ont pas les moyens.
Il faut le savoir.

Par ailleurs, comprenez l'appréhension que j'ai à chaque fois que l'on me demande mon numéro de téléphone… quand ce n'est pas pour me demander de nouer un autre type de relation (comprendre devenir la petite amie d'un inconnu) !

J'ai bien compris que les Africains sont souvent persuadés que le Blanc est beaucoup plus riche que n'importe quel Noir. Lorsque un Noir rencontre la route d'un Blanc, il faut que ce dernier ne laisse pas échapper une telle occasion de se "lier d'amitié" avec…
La plupart d'entre eux n'ont rien, effectivement, et veulent tout avoir.
J'ai vu dans certaines cours familiales, des mères de famille aller puiser l'eau dans un puits, à l'eau douteuse, et cinq minutes plus tard prendre un appel téléphonique d'un magnifique portable… que je n'ai même pas en ma possession !!
Le plus pauvre d'entre eux, préférera investir dans un téléphone portable dernier cri plutôt que d'améliorer quelques éléments "essentiels" de son quotidien.

lundi 21 janvier 2008

Boubou

J'aime beaucoup me promener dans les rues de Cotonou le vendredi. Je m'arrange toujours, aussi, pour passer à la banque ce jour là !
Il règne dans ce lieu glacé et froid une ambiance particulière… Silencieux, certes, mais égaillé le vendredi. Une petite note de couleur vient raviver les murs pâles des bureaux, une multitude de motifs se superposent aux rayures des rideaux. Des guichets ne dépassent plus que de magnifiques couvre-chefs. Le vendredi, les béninois rivalisent de toute beauté dans leurs habits. Qu'ils soient en wax hollandais, en bazin (tissu de couleur unie et brillant) ou en lessi (tissu brodé), le vendredi tout est permis !
La banque, si impersonnelle soit-elle, devient un lieu chaleureux. Mes yeux ne savent plus où regarder tant la blancheur des lieux met en valeur ces femmes et hommes si bien habillés !

La plupart des boubous sont d'ailleurs cousus main par un tailleur. Il suffit d'aller au marché faire son choix parmi des piles entières de tissus. C'est un régal pour les yeux ! En général, il est impossible d'acheter en dessous de 6 yards. Pour vous donner une idée, avec 6 yards nous pouvons réaliser deux boubous, deux ensembles. Il arrive souvent que sur une mobylette on aperçoive toute une famille habillée avec le même pagne : le père et le petit sur le guidon, la mère et le second au milieu ! Vraiment la classe !

Pour continuer à parler chiffon, il y a à Cotonou un épuisant marché aux fripes : Missébo. Sur deux allées ensablées, longeant la lagune, Missébo rassemble une multitude de petits commerçants, la plupart nigérians. Ils sont entassés les uns à côté des autres dans des "boutiques" recouvertes d'une tôle et séparées par de grands morceaux de tissu. La chaleur y est tellement éprouvante et la poussière suffocante qu'il est difficile de rester patient face à ces vendeurs de fripes agressifs.
Ils nous sifflent, nous sautent dessus en nous collant un jean sous le nez, ou encore nous agrippent le bras si violemment que pour finir c'est nous qui les agressons !
Après être parvenue à entrer dans une boutique (chacune est
spécialisée : jeans, maillots de bain, jupes et robes, …), le vendeur déballe une à une les pièces qu'il possède en les sortant d'un énorme sac en plastique blanc. Tous ces vêtements viennent d'Europe. Il arrive de tomber sur une marque vendue très cher en France que nous pouvons acheter pour 2,50 euros ici. Lorsque nous trouvons un modèle qui nous plaît il faut passer à l'essayage. Je vous laisse imaginer l'expédition pour essayer un jean par 38°C sous une tôle ondulée ! Il n'a plus qu'à espérer que ce soit la bonne taille !

mardi 15 janvier 2008

Cotonou-Paris, Paris-Cotonou

J'ai toujours été fascinée par les gares et les aéroports.

Ces lieux de rencontres, de passage. Regarder les gens partir.
D'un point A à un point B. Partir.
Partir ailleurs. Ici, ailleurs, Paris-Cotonou, Cotonou-Paris…
En reprenant mon vol ce 7 janvier, j'avoue avoir eu un moment d'hésitation. Repartais-je ailleurs, ou retournais-je ici… chez moi ?
Je n'avais pas vraiment su poser mes valises durant ces quinze jours que je repartais déjà ailleurs, enfin ici.
Se sentir loin de chez soi en son pays. Se sentir déracinée dans l'ailleurs. Etre étrangère ici et ailleurs. Expérience déroutante.
Je quittais Paris, ville aux milles scintillements pour Cotonou, la chaude, l'agressive, la puante, la fascinante, baignée dans l'obscurité. Cette obscurité si puissante, si prenante lorsqu'on la survole du haut de son oiseau d'acier. Cette obscurité noyant cette bouillonnante Afrique.

Cotonou, aéroport Cadjéhoun.
L'aéroport ressemble à s'y méprendre à un arrêt de bus. Arrêt de bus que l'on retrouve également à Lomé au Togo lorsque l'on prend la Royal Air Maroc et que l'avion prend des allures de taxi-brousse.
" Loméééé !! Arrrêêêêt pipiiiiiii !! 15 minutes d'arrêt !! "…
avant de repartir pour Cotonou.
A Cotonou donc, l'arrêt de bus est de proximité puisque le terminus se trouve au bout de ma vons. Les avions semblent d'ailleurs prendre leur envol sur nos toits. Il m'est souvent arrivé de m'accrocher aux draps de mon lit, vers 23h55, lorsque les avions décollent. Les murs se mettent alors à trembler. Mon cœur aussi… Un peu comme la grille des horaires de bus, nous connaissons tous les jours et heures de décollage ainsi que les compagnies correspondantes. L'aéroport a une place majeure dans la vie d'un étranger. Il n'y a pas un mois sans que nous ne nous organisons pas pour emmener quelqu'un qui voyage, ou pour aller chercher un nouveau venu. L'aéroport est ce seul lien si fort qui nous lie à notre pays d'origine. Une sorte de cordon ombilical, en fait !

Cotonou-Paris, Paris-Cotonou devient un flux constant de migrations humaines mais aussi d'échange de marchandises en tout genre.
Il n'est pas rare qu'un ami vous laisse deux ou trois lettres à poster en France. La poste béninoise n'étant pas si fiable. Curieusement, les départs et arrivées des français sont connus de tous.
Ne soyez donc pas surpris si vous recevez de mes nouvelles via
La Rochelle ! Il arrive que l'on se retrouve avec d'encombrants paquets (objets d'art, pulls achetés au marché aux fripes de Missébo pour un ami béninois parti vivre en France… paquet qui se perd parfois en route, d'ailleurs !)
Une fois en France, la liste des courses à faire est souvent longue…
et parfois incongrue. Cela va des lentilles de contact au thé en passant par la dernière paire de Converse en taille 42 ou l'imprimante que l'oncle de Monsieur Gbaguidi vivant à Clermont doit envoyer à une adresse qu'on aura pris soin de lui donner avant de partir.

L'avion et l'aéroport qui me fascinaient tant sont devenus communs.
J'y retrouve toujours un ami, une connaissance qui me rattache à un ailleurs commun.

mercredi 9 janvier 2008

"Heureu tou lané"

Une bonne année à vous !
... avec en bonus la mise à jour des petits papiers :
"Soyez les bienvenus !" et "Zone Duty Free".